mardi 8 février 2011

La laïcité

On peut définir la laïcité comme la séparation du religieux et du politique. Ce serait juste si l'on devait en conclure qu'il ne doit pas y avoir d'Eglise officielle, alors que les autres religions seraient tenues pour inférieures, ou même combattues par différentes moyens, pacifiques ou violents. Mais ce serait faux s'il fallait en conclure que l'Etat doit s'interdire toute subvention, toute action en faveur d'une religion, à la condition qu'il n'en privilégie aucune. Bref, financer des églises, des mosquées, des temples, etc. est parfaitement conforme à la laïcité, tant que les subventions pour chacune des religions est égale (ou bien dépendant d'un critère objectif, comme le nombre de fidèles pratiquants : il serait normal que l'Etat finance plus une religion pratiquée par trente millions d'individus qu'une religion pratiquée par trente individus. Oui, une religion pratiquée par trente individus ressemble à une secte, je vais y venir).

Qu'est ce qui me permet de conclure si brutalement ceci? C'est une définition de la laïcité qui, une fois qu'elle est formulée, me parait s'imposer d'elle-même. Je ne sais pas si elle a déjà été formulée, mais elle doit beaucoup aux idées de Marcela Iacub sur la sexualité. Celle-ci défend l'idée que notre société sera vraiment libérée, en matière sexuelle, le jour où l'État ne distinguera plus entre crime sexuel et crime non sexuel. Je ne rappelle pas la manière dont elle justifie son propos, l'essentiel est seulement de dire ici que l'Etat doit protéger les individus des violences et agressions, mais n'a pas à juger de ce qui est sexuel et de ce qui ne l'est pas. L'Etat doit punir toutes les agressions de la même façon, que la victime et l'accusé aient jugé que l'acte avait une connotation sexuelle, ou pas.
De manière analogue, il faut donc dire que la laïcité n'est justement pas la séparation du religieux et du politique, mais plutôt le refus que le politique définisse lui-même ce qui est religieux et ce qui ne l'est pas. Le politique n'a affaire qu'à des associations, des groupes humains ayant différentes activités, et il ne doit pas mettre le nez dans ces activités pour déterminer si elles ont une connotation religieuse ou pas. Ceci s'applique d'ailleurs très bien aux sectes : autant l'Etat doit punir comme il se doit les tentatives de manipulation et d'extorsion d'argent, autant il n'a pas à faire de cas particulier parce que cette manipulation serait l'oeuvre d'une secte, plutôt que de n'importe quel autre groupe. L'Etat doit traiter toutes les associations de la même façon, sans jamais faire de différences au nom du type d'activité de ces associations. S'il le faisait, alors il remettrait en cause le principe de laïcité.
Ceci implique, puisqu'une association sportive ou une association culturelle peuvent très bien recevoir des financements, qu'un église puisse aussi en recevoir, parce que l'État n'a pas à faire de différence entre ces associations. Sport, art, religion, etc. ces différences ne doivent être établies que par la société civile, et notamment les membres de ces associations, mais pas par l'État.
La séparation du religieux et du politique est donc en réalité la fin du droit qu'aurait l'Etat à définir ce qui est religieux et ce qui ne l'est pas. La religion devient une notion privée, fixée par les individus concernés, mais pas par un Etat.
Mettons maintenant les pieds dans le plat de l'actualité brûlante : pour l'Etat, il n'y a pas de signe religieux, ni à l'école, ni dans la rue, ni nulle part. Il n'y a que des tenues compatibles avec le bon déroulement des institutions, ou pas. Si l'on doit interdire le voile à l'école, c'est pour la même raison que l'on pourrait interdire les moufles en travaux pratiques de chimie, donc pas pour une raison religieuse.

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